Le Maître intérieur

Revue de pédagogie

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La Personne à l'école , Ana DUSSERT

Rémi : vignette clinique

AUTEUR


Ana DUSSERT

NUMÉRO


2025

Rémi, élève qui était en chimiothérapie à cause d’une rechute de la tumeur au cerveau dont il avait déjà été opéré à plusieurs reprises, était suivi d’un nombre d’adultes impressionnant. Nombreuses absences et une grande fatigue scandaient sa scolarité. Cependant, le temps de sa présence au collège, Rémi était plutôt en forme et commençait à manifester quelques comportements agressifs et des passages à l’acte difficilement abordables avec lui. Dès que j’ai avancé cette question en réunion d’équipe, une foule de professionnels s’est mise à parler pour justifier son comportement et expliquer ses causes : médicales, psychologiques, familiales, sociales, scolaires …


« La seule façon qu’il trouvait d’exister était son agressivité qui pourrait être interprétée comme un cri désespéré, manifestant son désir de vivre en tant qu’être parlant, au-delà des discours des experts, le figeant à la place de patient. »


Au point qu’il est devenu inévitable de faire taire tout ce petit monde des professionnels qui parlait à sa place. Car en parlant tous à sa place, nous ne lui donnions aucune possibilité d’exister en tant que sujet, en dehors de sa maladie. L’angoisse de mort était très présente dans l’équipe de suivi de ce jeune et les équipes, très bienveillantes, ont suffoqué le sujet. La seule façon qu’il trouvait d’exister était son agressivité qui pourrait être interprétée comme un cri désespéré, manifestant son désir de vivre en tant qu’être parlant, au-delà des discours des experts, le figeant à la place de patient. L’orientation que j’ai prise avec ce jeune semblait simple mais elle signifiait un vrai tournant de perspective : le tenir responsable de ses actes. C’était un axe de travail qui a ouvert la voie vers une parole singulière, lui donnant ainsi le droit d’exister. Ramener le symptôme au dire a libéré le sujet dans son acte.